Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/186

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entendu dire, — je ne voulais pas le croire, — le soir du 18 mars, que les malheureux généraux Lecomte et Clément Thomas avaient été assassinés par des gardes nationaux, oh ! ma conscience s’est sentie bourrelée, et je me suis demandé si je n’avais pas trop présumé de ceux en faveur de qui j’avais obtenu une semblable stipulation.

Eh bien ! je les adjure, — car il n’est jamais trop tard pour revenir au bien, — qu’ils le sachent, la responsabilité qui pèse sur eux est immense ; il dépend aujourd’hui de la garde nationale de Paris de consommer son déshonneur ou de se racheter.

Il sera maintenant établi qu’on a voulu la sauver de l’ennemi, qu’on y est parvenu, qu’on lui a conservé les fusils dirigés pendant cinq mois contre les Prussiens, et que, par un égarement criminel, qui, je l’espère n’a été qu’un moment de sanglante folie, s’emparant, au milieu d’une population si diverse, de cette tourbe impure qui contient tant d’éléments détestables…

M. Langlois. — Oh ! c’est affreux ! c’est atroce de dire cela !

M. l’Amiral Saisset. — Oui ! oui ! tout ce qu’on vous dit là, elle l’a toléré !…

M. le Ministre. — Mais qu’elle se rachète ! qu’elle comprenne que le salut de la patrie, — je ne parle pas de sa dignité, de son honneur, — que le salut de la patrie est entre ses mains ; que, quoi qu’il arrive, la souveraineté du peuple aura le dessus ; et la France ne tombera pas en dissolution ; et elle n’est pas réduite, par une défaillance, qu’on lui a mal à propos prêtée, à courber le front sous le niveau sanglant, qui est dans la main d’une minorité factieuse.

Mais ce que je désire du fond de mon cœur, c’est que la garde nationale de Paris revienne enfin au sentiment de sa situation, qu’elle comprenne le grand mot : Noblesse oblige ! et qu’après avoir conquis devant l’ennemi, devant la France entière, les plus beaux titres à l’admiration publique, il ne faut pas qu’en un jour d’oubli elle aille compromettre ses plus beaux privilèges. Il ne lui en reste plus qu’un à conquérir, c’est d’entendre votre voix et de faire justice enfin des misérables qui oppriment la capitale. (Bravos et applaudissements prolongés et répétés.)

La moralité de cette harangue furieuse, rappelant les invectives et les menaces lancées contre Paris, à la tribune