Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/197

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« Je demande à tous ceux qui trouvent que je n’ai pas fait tout ce que j’avais à faire, ce qu’ils auraient fait à ma place ? » M. Tolain s’écria avec raison : « Je croyais que le pays était assez désorganisé déjà pour qu’on ne vint pas ajouter à cette désorganisation. Vous voulez donc organiser en France la guerre civile ? » Comme un des membres lui lançait cette apostrophe : « Il y a trois ans que vous prêchez la guerre civile ! », l’ancien délégué ouvrier répondit avec à propos et énergie :

Permettez-moi de vous dire, qu’en siégeant dans cette assemblée, j’ai fait un plus grand sacrifice qu’aucun de vous n’en a jamais fait. Je proteste, car moi qui suis sorti de la classe ouvrière, et qui n’ai jamais aspiré qu’à son émancipation, je n’ai eu espérance que dans le siège : je croyais qu’en versant notre sang avec les bourgeois, nous aurions scellé la République. Croyez-moi, faisons des sacrifices. Franchement, je vais vous dire le moyen de conjurer la situation : proclamez la République, nous pourrons rentrer à Paris et Paris nous acceptera avec bonheur !

Ce langage incorrect mais sincère produisit une certaine impression et fit taire la droite sans la persuader. La création des bataillons de volontaires fut adoptée par 433 voix contre 29. Ces miliciens de guerre civile ne furent organisés qu’en partie et, sauf les volontaires de Seine-et-Oise, se signalèrent peu dans les combats terribles autour de Paris comme dans la guerre de rues. Ils ne firent pas oublier leurs impitoyables devanciers, les gamins braves et féroces de la mobile de Juin 48. M. Thiers, il est vrai, ne tenait pas beaucoup à ces guerriers novices, et leur préférait, pour combattre les fédérés, de solides gendarmes. La garde nationale de Versailles, qui comportait 4,000 hommes, ne fut pas non plus beaucoup utilisée. On ne lui demanda même aucun service, sauf dans les premiers jours. M. Thiers et l’Assemblée, pour tout ce qui rappelait, même faiblement,