Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/201

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Je quitte le palais de l’Assemblée sous le coup de la plus douloureuse émotion. La séance vient de se terminer par l’une de ces épouvantables tempêtes parlementaires, dont les seules annales de la Convention nous aient légué le souvenir ; mais du moins quand on relit ces sombres pages de la fin du siècle dernier, le dénouement console toujours des tristesses tragiques du drame. La Patrie, la République, sortent plus grandes de ces crises, et le débat plus tourmenté enfante quelque héroïque résolution.

Vous ne trouverez rien de pareil au bas de mon récit…

Il raconte la scène honteuse, dont rien de grand, rien d’utile ne pouvait sortir, et termine ainsi son compte-rendu :

La séance est levée, l’ordre du jour étant épuisé ; l’agitation est à son comble dans les tribunes qui s’évacuent lentement.

Les pauvres maires restaient là debout, la contenance embarrassée, la figure désolée. Arnaud de l’Ariège vient les rejoindre et ils partent les derniers.

À la sortie, je vois des femmes du meilleur monde, de l’esprit le plus distingué, du plus grand cœur, qui pleurent sur le spectacle auquel elles viennent d’assister. Comme je les comprends ! n’est-ce pas avec toutes nos larmes qu’il faudrait écrire la lugubre page d’histoire que nous faisons depuis quelques mois. C’est ainsi que les gens de Versailles comprenaient et voulaient la réconciliation.

EXCUSES DU PRÉSIDENT

La séance de nuit s’ouvrit à neuf heures et un quart. Le tumulte de l’après-midi avait attiré un grand public. Les tribunes étaient pleines. Le pétulant Baze avait placé les maires à la galerie du premier étage, et les avait priés de retirer leurs écharpes tricolores, qui avaient tant offusqué les ruraux. Ils voyaient dans cet insigne, pourtant tout ce qu’il y avait de plus légal et pacifique, le symbole de l’émeute. Les maires, penauds et humiliés, avaient fait un effort d’amour propre pour revenir dans cette salle, où les députés les avaient hués, se hâtant de se couvrir pour indi-