Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/216

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En engageant des pourparlers inutiles et dilatoires, et en signant ce qu’on a appelé leur capitulation, les maires faisaient gagner huit jours à Versailles, a dit M. Vautrain, et il a ajouté :

Vous n’aviez pas le moyen à Versailles de résister à une attaque. L’amiral Saisset me l’a répété quand je suis venu à Versailles. Si l’insurrection, au lieu d’être retenue à Paris par les élections, était venue à Versailles, dites-moi ce que fût devenue la France ? Oh j’en appelle ici à vos consciences, je vous prends comme jurés, j’ai besoin de votre avis, il faut que vous connaissiez les intentions et que vous en voyez les conséquences. Supposez l’insurrection arrivant à Versailles, rappelez-vous l’attitude des grandes villes de France. Je ne regardais pas seulement Paris, mais Toulon, mais Marseille, mais Lyon. Vous les regardiez aussi. Eh bien ! supposez l’insurrection arrivant à Versailles, avant que vous ne fussiez absolument sûrs de la troupe, et dites-moi ce que nous serions devenus ? Dites-le moi, est-ce que c’est une hypothèse gratuite que celle de l’attaque sur Versailles ?…

Eh bien, messieurs, j’ai la conscience sûre que les huit jours que vous ont fait obtenir les élections ont été le salut de la France. Il est incontestable qu’à Paris, les jours de vote, il n’y a jamais de troubles. C’est une règle sans exception. Toutes les fois qu’on vote, chacun espère que la boîte de pandore s’ouvrira pour satisfaire à ses désirs. Il y a eu trois jours de perdus par ces gens-là, grâce aux élections, il y a eu trois autres jours perdus pour l’élection de leur bureau, et l’attaque du Mont-Valérien n’a eu lieu que le 2 avril. Nous avons donc fait gagner, mes collègues et moi, huit jours de plus… Au 2 avril, les choses étaient changées. Le colonel Luckner, qui commandait le fort du Mont-Valérien, avait remplacé sa garnison, des renforts étaient arrivés de Versailles et vous savez Ce qui est advenu…

(Extrait de l’Enquête parlementaire.)

Ainsi de l’aveu de M. Vautrain, aveu que rien ne le forçait à faire, et qui eut grandement gêné M. Thiers, s’il se fût produit au cours de ces négociations trompeuses, les élections et les manœuvres des maires ont fait perdre huit