Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/229

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Banque ou sans hésiter aurait-on dû s’emparer de ses réserves métalliques, de son portefeuille, et en disposer ? C’était faisable, était-ce utile ? Nous examinerons le pour et le contre, quand nous traiterons du rôle du Délégué Beslay à la Banque. Disons que de graves considérations de crédit, pour la France et pour l’Europe, de dignité gouvernementale aussi, pouvaient prévaloir. La Commune, gouvernement établi par le suffrage universel, ayant les apparences régulières, légitimes même, devait fonctionner avec les formes légales de tous les régimes précédents, issus comme elle d’une insurrection victorieuse. Pouvait-elle mettre au pillage la Banque Nationale, citadelle de la solvabilité française ? Les révolutions de 1830 et 1848, le coup de Décembre 51, s’étaient montrés respectueux de ces coffres tentateurs, et s’étaient bien trouvés de ne pas avoir égorgé la poule aux œufs d’or et étranglé la confiance dans le crédit de la Banque et du gouvernement. Ces scrupules auraient pu ne pas arrêter le Comité Central, qui n’était qu’un pouvoir provisoire, né de l’insurrection et la continuant, susceptible de procéder à des réquisitions arbitraires, dont les insurgés de tous les temps et dans tous les pays ont fourni des exemples. La Commune, au contraire, pouvait, devait hésiter. Il y a une distinction à faire entre les deux gouvernements et les deux époques.

En réservant l’examen de ce problème délicat, on peut répondre à ceux qui accusent le bonapartiste Rouland d’une complaisance injustifiée envers le Comité Central, qu’il a agi sagement, en politique avisé, en financier prudent, lorsqu’il a donné le million : le désespoir, la faim et les menaces des gardes nationaux eussent poussé le Comité Central à de bien plus grandes exigences.

Que serait-il arrivé si le Comité avait forcé les caves de In Banque ? Le crédit de Versailles eût été coupé ; c’eût