Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/230

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été dans l’armée régulière qu’on eût conçu de l’inquiétude au sujet de la solde. Et puis, avec de l’argent, beaucoup d’argent, les conditions de la lutte eussent changé. Thiers, privé du nerf indispensable, eût-il osé poursuivre ses projets de guerre civile ? Il eût capitulé, sans attendre les maires. Il eût tout cédé : les franchises communales avec le reste, la garde nationale demeurant armée et commandée par un chef élu, pourvu qu’on respectât la Banque de France, sans le crédit de laquelle il ne pouvait ni payer les soldats présents, ni faire revenir d’Allemagne la garde impériale, la garde, pour lui aussi, suprême espoir et suprême pensée. On voit qu’il est au moins contestable que le gouverneur de la Banque, en consentant une maigre avance d’un million, ait rendu un réel service au Comité Central, et par suite à la Commune.

Le Comité Central n’avait pas les raisons de modération, vis-à-vis de la Banque, que par la suite la Commune a invoquées. M. Rouland pouvait donc craindre une prise de vive force par le Comité. Il se montra gouverneur habile autant que prévoyant, lorsque, pour conserver les richesses de la Banque, il en sacrifia une parcelle.

LES SOLDATS ISOLÉS

Le Comité prit, le 22 mars, une mesure fort discutable : celle de l’incorporation des soldats désarmés et qui n’avaient pu retourner dans leurs foyers. On décida qu’ils seraient versés dans les compagnies de gardes nationaux et qu’ils toucheraient l’indemnité des gardes.

Évidemment, il était inhumain, et peut-être périlleux, de continuer à laisser vaguer dans Paris ces hommes désœuvrés, dépaysés, sans ressources, logés au hasard chez l’habitant ou dans de mauvais baraquements, dans des caser-