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qu’on venait d’accomplir. Il fut recommandé de venir en uniforme de garde national, mais sans armes.

LA MANIFESTATION RUE DE LA PAIX

On peut se demander quel but se proposaient les organisateurs de la manifestation du 21 et de celle qu’ils décidaient de recommencer le lendemain. On a soupçonné une tentative de soulèvement bonapartiste. Tout espoir n’était pas alors entièrement abandonné par les partisans du régime déchu. Napoléon III était libre. Il avait quitté Cassel, le 19 mars, et s’était rendu en Angleterre, à Chislehurst, où l’impératrice était allée le rejoindre. Bien abandonné des Français, l’ex-souverain avait conservé un appui, un seul, mais puissant : Bismarck. Le Chancelier, et, selon ses vues, l’empereur Guillaume, eussent avec plaisir appris qu’une restauration impériale était possible. Bismarck avait déjà, durant les négociations pour les préliminaires de paix, entretenu des rapports avec des agents bonapartistes, notamment avec Clément Duvernois. Si un conflit grave survenait, comme une guerre civile dans Paris, si une bataille s’engageait entre Parisiens et non plus seulement entre Versaillais et Communards, il pouvait prétendre que son gage était menacé et intervenir pour sauvegarder les intérêts des vainqueurs Alors les armées allemandes entraient dans Paris, à la faveur de l’insurrection, mettaient le holà entre les combattants, après avoir déclaré Thiers et l’Assemblée nationale impuissants à assurer le paiement de l’indemnité. Le retour de Napoléon III pouvait paraître rassurer l’Allemagne sur l’exécution des conditions de la paix. Ainsi, une guerre civile éclatant dans Paris même, entre habitants de la même cité, pouvait devenir l’occasion favorable pour une restauration impériale, avec la complicité de Bismarck.