Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/272

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Il n’y a donc pas à rechercher si les premiers coups de feu, les coups de feu tirés en l’air et qui n’atteignirent personne, sont partis des rangs des gardes nationaux ou de la foule. Le général américain Sheridan, qui logeait dans un des hôtels meublés de la rue de la Paix, et de sa fenêtre suivait le défilé des manifestants, a déclaré que ceux-ci avaient tiré les deux premiers coups de pistolet, dont parlent tous les récits, mais ce témoin, de l’endroit où il était placé, a pu voir mal et se rendre compte des choses inexactement.

Sans s’attarder à cette vérification qu’on ne put faire le jour même de la bagarre, et qui est devenue aujourd’hui impossible, en ne considérant que la décharge qui suivit les roulements de tambour, et qui partit bien des rangs des gardes nationaux, appartenant aux 80e, 179e et 215e bataillons, il est permis de reconnaître que ces troupes, en service commandé, ayant reçu la consigne d’empêcher les manifestants de franchir le cordon d’arrêt et d’envahir, comme ils l’avaient fait impunément la veille, la place Vendôme, en menaçant l’Hôtel de l’état major d’une irruption peut-être irrésistible, devaient disperser par la force l’attroupement, qui continuait à grossir et à avancer. En temps normal, tout gouvernement ainsi provoqué, ayant ses consignes forcées, se fût défendu de même. Le Comité Central ne pouvait tolérer une seconde fois cette manifestation de soi-disants Amis de l’Ordre, qui suscitaient le désordre. En cherchant un conflit, ils commençaient une émeute.

Les ordres donnés par le chef de l’état-major Bergeret ne pouvaient pas rester sans sanction. La place Vendôme devait être déblayée sur l’heure. Comme on l’a vu par le récit de M. Charles Bocher, les gardes nationaux essayèrent d’abord de se dégager, à l’arme blanche. Les premiers rangs des manifestants furent repoussés à la baïonnette. La fusillade qui suivit fut la conséquence du mouvement en