Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/296

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battu au matin du dix-huit mars, et il n’y avait pas à compter sur eux. Quant à la nomination d’un Conseil communal, il ne voulait pas en entendre parler. Paris, selon lui, devait demeurer à perpétuité en tutelle, comme sous la monarchie, privé des franchises municipales des autres communes, soumis à un régime particulier. Il ne considérait les pourparlers pacifiques et les démonstrations bourgeoises que comme des moyens propres à faire perdre au Comité Central le temps que lui gagnait. Ainsi ces négociateurs de mauvaise foi ne voulaient qu’endormir l’activité révolutionnaire, émousser les énergies. Ils se proposaient surtout de retarder la décision qu’ils redoutaient par-dessus tout, et qu’ils supposaient imminente, d’une marche sur Versailles, pas encore en état de défense.

Toute autre était la pensée de M. Schœlcher, et l’on a eu tort, notamment Gaston Da Costa, d’interpréter différemment ses intentions et ses paroles. La réponse qu’il fit à l’un des commissaires éclaire ce point obscur. Le marquis de Quinsonas lui ayant demandé : « Vous croyez donc qu’il était possible d’éviter la guerre civile ? » Avec franchise Schœlcher répondit :

Oui, je crois que si nous avions pu avoir encore huit ou dix jours pour nous organiser, nous aurions opposé un tel frein au Comité Central, ou bien à la Commune qui lui a succédé, qu’elle n’aurait pas accepté la lutte, ou que si elle l’avait acceptée, nous aurions été très rapidement vainqueurs. Je crois que, si on avait résisté, on serait toujours arrivé à la guerre civile, mais à une guerre civile beaucoup moins longue que celle qui a eu lieu. Je crois qu’avec 200,000 gardes nationaux résolus on serait arrivé à bout du mouvement. T’elles sont du moins mes impressions personnelles.

(Enquête parlementaire. Déposition Schœlcher. Séance du 30 juin 1871 t. II, pp. 329-330.)