Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/323

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che : « Ne vous inquiétez pas, Messieurs, des paroles qui échappent de ce côté. Elles ne m’atteignent pas. Veuillez continuer votre discours, M. Le Provost de Launay, mon observation restera. » « Et la mienne aussi ! » cru devoir riposter M. de Cassagnac. Floquet reprit alors d’un ton hautain, relevant fièrement la tête et toisant son insulteur : « Votre observation restera au Journal Officiel, dit-il avec une fermeté froide, et je regrette qu’elle ne puisse pas être imprimée en caractère spécial, pour l’édification du pays, afin qu’il voie quel est le langage qu’emploient dans cette enceinte ceux qui se prétendent des gentilshommes. » Au milieu d’une salve d’applaudissements partie des bancs républicains, et de quelques grognements de la droite, M. de Cassagnac hurla : « Je n’ai jamais insulté l’empereur de Russie ! » Et M. Floquet de répliquer : « Continuez, Monsieur, joignez le patriotisme à la politesse. Je ne vous rappellerai à l’ordre pour aucune des paroles que vous m’adresserez ! » Floquet eut ce jour-là l’un de ses plus vifs succès parlementaires.

Son intelligence était ouverte à toutes les manifestations du génie national. Sa culture était beaucoup plus développée que celle de la plupart des hommes d’état. En art, en littérature, sa pensée allait hardiment au devant des formules neuves et des talents originaux. Il était, depuis de longues années, l’admirateur et l’ami de l’auteur dramatique le plus vigoureux de son temps, l’âpre et puissant Henri Becque. Aimable avec tous, il se faisait plus accueillant, plus familier, avec les artistes et les gens de lettres qu’il se plaisait à voir en relations privées. Il était patriote dans la force de l’âme et les idées socialistes, pour le progrès desquelles il a loyalement travaillé, lui eussent paru abominables, s’il avait pu supposer que, par la suite, des rhéteurs de l’anarchie voudraient faire de l’antipatriotisme