Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/39

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tiers, dans leurs bataillons, et cela, pour le moment, tait une investiture suffisante.

Il ne faut pas oublier que la révolution du Dix-Huit mars était issue ni d’un conflit parlementaire ni d’une conspiration organisée par des chefs déjà notoires et populaires, comme c’eût été le cas autrefois. Si les complots et les émeutes de 1832, de 1839, sous Louis-Philippe, eussent réussi, Barbès, Blanqui, Martin Bernard, avec l’adjonction de célébrités de la presse et de la tribune, comme Louis Blanc, Proudhon, Raspail, eussent été les membres, prévus ou subis, du gouvernement provisoire nouveau. Ici rien de pareil. Le Dix-Huit mars, résultat d’une surprise, suite l’une provocation manquée, ne fut pas, en réalité, une révolution faite par l’ensemble de la population, c’est-à-dire par la coalition des travailleurs, des chômeurs, des miséreux des faubourgs, avec les mécontents et les audacieux de la bourgeoisie, mais bien un pronunciamiento, républicain assurément, ayant quand même le caractère et l’impulsion initiale d’un soulèvement militaire. Ce sont les troupes qui sont pas tenu et se sont prononcées pour la débandade. Ce sont les bataillons de la garde nationale qui ont résisté à l’attaque de Thiers et de l’armée, qui ont paralysé celle-ci, mis en fuite celui-là. Le Dix-Huit mars fut une insurrection de régiments de ligne accompagnée d’une révolte de bataillons de miliciens. Ceux-ci étaient composés de citoyens armés, de volontaires, mais constituaient une troupe organiste, enrégimentée, ayant ses cadres ; les insurgés non militarisés ne comptaient pas. Tous les citoyens étaient alors, par le fait de la guerre et du siège, incorporés, mais la garde nationale n’en composait pas moins une force militaire, distincte de la population prise dans son ensemble. Ce n’était plus, mises au service d’une émeute, les masses ouvrières ou bourgeoises prenant spontanément