Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/40

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le fusil et courant aux barricades improvisées au hasard des appels populaires. C’était donc un résultat logique de voir les chefs réguliers de cette garde nationale, les élus de ces bataillons, depuis longtemps formés, prendre le pouvoir, occuper les sièges et les édifices officiels vacants, et parler au peuple comme étant la seule autorité existante. Ces membres du Comité Central, tous investis par le suffrage de la garde nationale, formaient comme une députation de l’armée citoyenne. Ils étaient les représentants du peuple armé. Leur pouvoir provisoire était légitime, sinon légal. La force faisait leur droit.

L’obscurité de ces chefs nouveaux n’était que relative. Ils avaient la notoriété qu’il fallait. L’idéal, le type irréalisable d’un gouvernement démocratique, n’est-ce pas le gouvernement direct ? Chaque citoyen émettant son vote, imprimant l’impulsion à tout l’État, prenant les décisions utiles et les appliquant sans intermédiaire ? C’est une utopie admirable, mais aussi une chimère dangereuse et inapplicable pour les agglomérations considérables. Les républiques antiques ne contenaient que des bourgades, et les citoyens actifs, ceux qui exerçaient le droit de vote et de contrôle sur les affaires publiques, pouvaient se trouver tous rassemblés, à un signal donné, sur la place publique, comme dans une salle de séances. Le système concentrique de la garde nationale fédérée se rapprochait, le plus qu’il était possible dans notre état social, du gouvernement direct et chaque mairie devenait forum et agora. Quant à l’inconvénient de la délégation du pouvoir à des hommes n’ayant d’action et de rayonnement que dans un cercle étroit, il était compensé par l’avantage démocratique de la participation immédiate de toutes les fractions du peuple à l’administration de la cité. C’était le point de départ de l’organisation de la République communale et fédérale, qui sera certai-