Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/396

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impossible de résister plus longtemps, le stratège versaillais confessa son impuissance momentanée au député-maire, l’un des chefs de la résistance parisienne :

Vous avez raison, me dit M. le président. Il n’y a rien à faire pour le moment. Je suis en train de réorganiser l’armée. Le général Clinchant est dans le nord, avec le général Ducrot. J’espère qu’avant quinze jours ou trois semaines nous aurons une force suffisante pour délivrer Paris. Je fais faire des baraquements pour loger mes soldats, un peu mieux qu’ils ne le sont sous ces tentes d’esquimaux qui remplissent les avenues de Versailles. Le cœur me saigne, répétait-il, quand je les vois si mal logés. Mais enfin, pour le moment, je ne puis faire mieux, et je ne puis rien faire pour délivrer Paris.

(Enquête parlementaire. Déposition de M. Tirard, t. II, p. 342.)

Cet entretien avait lieu le samedi 25 mars, la veille des élections. La convention était signée et connue de M. Thiers, qui s’en félicitait, puisqu’elle secondait ses desseins, et lui donnait, avec l’installation de la Commune et les vaines formalités parlementaires qui s’ensuivraient, une pleine semaine de répit pour rassembler ses troupes et combiner son attaque. L’allégation de M. Degouve-Denuncques est donc sans portée, et ce fut son collègue Vautrain qui était dans le vrai. Il servit bien mieux que lui la réaction.

Une autre assertion de cet adjoint, plus pressé que M. Thiers et aussi que le Comité Central, de voir la guerre civile commencer, est également sans valeur. M. Degouve-Denuncques voulait tirer parti des paroles de Ranvier, relatées plus haut, quand il refusait l’ajournement des élections en disant que « le Comité Central ne pouvait plus attendre, et que les gardes nationaux étaient exténués par le service ». M. Degouve-Denuncques prétendit que le délégué du Comité Central avait laissé échapper cet aveu : « Si nous consentons à un ajournement, nous sommes perdus »