Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/402

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Louis Blanc n’avait pas de sympathie bien vive pour le Comité Central et ne fit point adhésion à la Commune. L’illustre historien de la Révolution, le hardi socialiste de 1848, le seul véritable républicain démocrate du gouvernement provisoire, l’organisateur du parlement ouvrier du Luxembourg et le premier ministre qu’eurent les travailleurs, était certainement de cœur et d’intention avec les républicains parisiens. Mais il s’était trouvé débordé. Sa raison, autant que son orgueil, n’admettaient pas un mouvement par lequel il se sentait dépassé[1].

Louis Blanc subissait fatalement l’influence de son milieu et n’avait plus l’énergie révolutionnaire assez vive pour se séparer de républicains sincères, mais devenus timides, comme Clemenceau, Henri Brisson, Charles Floquet, Martin Bernard, Greppo, Tolain, et d’autres, plus illustres encore, tels que Victor Hugo, Littré, Gambetta, qui, sans aller jusqu’à combattre la Commune, n’osèrent point la soutenir et la sauver.

Louis Blanc avait l’effroi et l’horreur de la guerre civile. Ce sentiment le domina et dicta sa conduite. Il se souvenait des répressions de juin 48 ayant eu pour résultat le Deux Décembre et l’empire, et il faisait tous ses efforts pour éviter le retour de semblables luttes fratricides, génératrices des pires réactions. C’est à ce point de vue qu’il convient de se placer, pour juger de son attitude, qui fut celle de républicains excellents, auxquels on doit reprocher seulement d’avoir été les dupes de M. Thiers et de n’avoir pas eu confiance dans l’avènement d’un régime nouveau. Il est vrai qu’ils n’avaient pas été appelés à en faire par-

  1. L’auteur qui eut l’honneur d’être, par la suite, le collaborateur, à l’Homme libre, de Louis Blanc, et son ami, jusqu’à ses derniers moments, ne peut que constater cette résistance et cette abstention de l’illustre socialiste, en les regrettant, mais sans oser les juger trop sévèrement.