Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/410

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l’émeute par la force, par le nombre, et qu’ils auraient raison du Comité Central, firent-ils toutes les concessions ?

Pourquoi les vrais républicains, ceux qui ne faisaient point le jeu de M. Thiers, mais qui repoussaient la guerre civile, capitulèrent-ils, au lieu de laisser aller les choses ?

Ils ont dit qu’ils voulaient éviter l’effusion du sang. Ce sentiment est humain et l’explication doit être tenue pour l’expression au moins partielle de la vérité. Ils ne prévoyaient pas qu’ils ne faisaient qu’ajourner la saignée, et qu’aux victimes et aux morts, qui pouvaient résulter d’un combat fratricide dans les rues avoisinant l’Hôtel-de-Ville, se substituerait bientôt une atroce extermination, une boucherie aveugle et féroce dans tous les quartiers de Paris bombardé, saccagé, en flammes et en ruines.

Mais cette pensée, cette arrière-pensée, comme disait M. John Lemoinne dans les Débats, dominait ces élus de novembre 70 et de février 71 : « Si nous entamons la lutte, si nous remportons une victoire sanglante, malgré la nécessité dominante et la sincérité de nos intentions, malgré la justification de l’ordre républicain à maintenir et le souci de la défense de la légalité, nous nous rendrons odieux, impossibles aussi. Bien vite, on oubliera que nous avons risqué notre popularité et notre existence, pour rétablir le calme dans la cité, pour donner à Paris ses libertés municipales, avec un régime régulier, légal, ramenant le travail, la confiance, la prospérité ; on méconnaîtra nos bienfaits et nos services. Nous ne serons plus les favoris du suffrage universel. Un mouvement de réaction impossible à enrayer se produira. Nous en deviendrons les victimes. Nous serons à la merci d’une assemblée dont les sentiments républicains sont douteux, où les éléments monarchistes sont puissants. Si les royalistes ne sont pas assez hardis ni assez