Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/478

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Enfin le Comité Central a agi avec autant de patriotisme que de tact et de prudence dans les circonstances les plus délicates, lors de ses rapports avec les généraux allemands, dominant la cité, tandis que M. Thiers se prosternait à leurs pieds et leur cirait les bottes pour obtenir d’eux les moyens de mitrailler plus tôt et plus complètement Paris.

Le Comité Central ne mérite donc aucun des injustes dénigrements dont il fut l’objet. Il serait demeuré admirable et son renom ne souffrirait aucune atteinte, s’il n’avait failli à son mandat, et, par son inertie et sa fausse conception de son rôle, trahi, inconsciemment, la grande cause qu’il avait à défendre.

Il eut le tort immense, et nous avons indiqué, précisé ce tort, de ne pas rester ce qu’il était : un pouvoir insurrectionnel, un gouvernement de barricades, de batailles et de combats sans relâche. Il a voulu négocier, faire de la diplomatie, de la politique, consulter le suffrage universel et instituer une assemblée parlante. Illusion et sottise ! Il devait ne considérer l’Hôtel-de-Ville que comme un quartier général, et marcher à l’ennemi, sans regarder en arrière. Quand on tire l’épée pour la guerre civile, a dit un capitaine des guerres de religion, Montluc, il faut jeter derrière soi le fourreau.

Le Comité Central a gardé soigneusement le fourreau, et il s’efforçait d’y faire rentrer l’épée. Préoccupation humanitaire, louable en d’autres temps, alors funeste. Il s’est laissé duper par M. Thiers et par les maires. Il devait ajourner la convocation de la Commune jusqu’à ce que Versailles fût occupé et l’assemblée monarchiste dispersée par la force, ou dissoute par la peur. En permettant à M. Thiers de gagner du temps, il lui permettait de gagner les combats futurs. Il ne devait pas laisser rassembler une armée à