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puis les trouver que dans un gouvernement régulier, et suffisamment réactionnaire pour maintenir la France dans l’état d’abaissement moral et matériel, qui a permis mes victoires.

Les Prussiens alors auraient repris leur mouvement en avant, recommencé la guerre, bombardé, occupé Paris, étendu leur Occupation en province, sans qu’il fût possible de leur résister.

Leur résister ? avec quels éléments, en effet, au milieu de cette désorganisation générale ?

Ce n’est point, certes, le gouvernement de Versailles qui aurait envoyé contre eux, en s’unissant aux révolutionnaires, ce qui restait de troupes régulières en France, et les révolutionnaires, n’ayant pas même eu vingt-quatre heures devant eux pour organiser une force quelconque, n’auraient pu que mourir.

Ils l’auraient fait, mais la France était perdue.

Dans le jeu de M. Thiers il n’y avait qu’un atout, mais un atout terrible : les Prussiens !

Avec eux, il n’avait rien à craindre.

La révolution victorieuse pour un jour, à laquelle il n’eût même pas essayé de résister, qu’il attendait à Versailles, son sac de voyage sous le bras, se fût brisée le lendemain sur la pointe des casques allemands.

Avec les Prussiens, il l’écrasait, il soulevait le reste du pays, en lui criant :

« Voyez ces révolutionnaires, ces socialistes, ce sont eux qui livrent la patrie à l’étranger, qui nous condamnent à subir les plus grandes humiliations, à accepter de plus cruelles concessions. Ce sont les complices, les soudoyés de Bismarck. Ce sont des Prussiens ! »

L’idée communaliste, l’idée nouvelle ne pouvait se produire, s’affirmer, se formuler ; elle disparaissait déshonorée et noyée dans l’immense cataclysme de la patrie.

Cette considération, cette crainte de l’intervention prussienne, domina toutes les préoccupations du Comité Central, pesa sur toutes ses décisions.

(Histoire populaire et parlementaire de la Commune de Paris. Arthur Arnould. Bruxelles 1878.)

Il est possible que cette crainte ait paralysé le Comité Central, et qu’elle l’ait décidé à temporiser, quand il fallait agir, lorsque la rapidité, la violence de l’action étaient les