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Page:Les Deux Bourgognes, tome 7, 1838.djvu/42

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devant une modeste table en chêne, qui conservait toute sa rudesse primitive, non plus, comme la veille, dans son mystérieux laboratoire, mais dans une chambre beaucoup plus simple située au-dessous. Le luxe en était sans doute scrupuleusement banni, mais on y voyait au moins la trace de quelques efforts pour en rendre l’habitation plus commode, car la chambre était planchéiée, et il s’y trouvait une grande armoire, un lit et quelques fauteuils couverts d’anciennes tapisseries. La cheminée était même décorée d’un fragment de miroir, ainsi que de deux vases de porcelaine, dont l’un était couché sur le flanc, à côté de son pied, comme une statue antique, renversée de sa base par l’injure des années.

Cornelio était assis dans ce triste appartement, fort prosaïquement occupé à manger une croûte de pain avec un morceau de fromage di grano, que nous appelons Parmesan, je ne sais pourquoi, puisqu’il ne se fabrique ni à Parme ni dans les environs de Parme, lorsqu’il vit tout à coup la porte s’ouvrir, et entrer une jeune femme qui brilla comme une suave apparition dans son réduit. Celui qui avait vu une fois sa taille si délicate, sa physionomie à la fois vive et mélancolique, ses beaux cheveux bruns qui encadraient si bien sa figure pâle, ne pouvait la méconnaître un instant. C’était la Zoccolina.

Elle alla tout droit au vieillard, dans les bras duquel elle se jeta, et elle l’embrassa en silence. Ce fut lui qui parla le premier, en lui prenant la main dans les deux siennes et en la regardant avec tendresse et admiration.

« Ma pauvre Esther, lui dit-il, qu’es-tu devenue depuis trois jours que je ne t’ai vue, méchante fille ? Les étudiants t’ont-ils jeté bien des bouquets ? ou bien quelque prince t’a-t- il promenée dans sa voiture ? Voilà comme vous êtes tous, vous autres enfants. Les plaisirs et la vanité vous font oublier vos vieux parents qui vous aiment, friponne ! Mais quoi ! poursuivit-il en l’attirant vers lui, vas-tu pleurer, mon Esther ? Vas-