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Page:Les Deux Bourgognes, tome 7, 1838.djvu/94

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concetti de mauvais aloi, mais il se croyait obligé de donner une conclusion à ses paroles, et, quand il traitait une question, de la discuter avec science et avec conscience. Aujourd’hui, nous n’en sommes plus là. Le journaliste semble se considérer comme un baladin qui n’a rien à faire avec la pensée de ses lecteurs, mais qui doit seulement les divertir ; aussi apprend-il par cœur une petite routine de gambades, de culbutes, de sauts périlleux, et il croit que tout est dit quand il a passé sa tête entre ses jambes. La philosophie, qu’en a-t-il besoin pour rire de tout ? L’érudition, ce serait du plomb dans ses poches. Lire leurs énormes articles pour y trouver l’imperceptible dose de sens commun dont ils ont l’art de se contenter, ce serait vider un puits pour y chercher une épingle. Hélas ! ces messieurs nous ont montré l’impuissance de ce don qu’on appelle l’esprit ; ils en ont eu en abondance, de l’esprit ; ils en ont eu plus que Lucien, plus que l’Arioste et plus que Voltaire. Et avec tout cela qu’ont-ils produit, si ce n’est le plus grand déluge d’esprit à propos de rien qu’on puisse voir ? Quant à moi, je trouve que l’esprit nous déborde et nous étouffe. Il y en a de quinze coudées au-dessus des plus hautes montagnes. Combien de temps, hélas ! attendrons-nous encore la colombe qui nous rapportera dans son bec une branche de verdure native ?

— Hé ! dit Cornelio, littérairement parlant, ce n’était pas mal pensé, car il faut avouer qu’il y a bien du dévergondage dans la presse périodique.

— Cela peut être, reprit la cantatrice ; mais tenir ce langage en face à une puissance comme Saphir, c’était plus qu’une hardiesse ; c’était un coup d’état. Je compris aussitôt que je n’avais pas huit jours à tenir en scène, si je ne parvenais à réparer cette imprudence inqualifiable.

Vous blâmerez peut-être, mon père, la démarche que je vais vous avouer ; mais considérez la position dans laquelle je me trouvais. Je lisais de plus en plus chaque jour, dans le