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Page:Les Deux Bourgognes, tome 7, 1838.djvu/96

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— J’avais souvent entendu parler de bagues pareilles, mais je n’y croyais pas ; je n’y crus pas encore malgré la réponse d’Octavio, quoiqu’il me la fît d’un air sérieux.

Cependant, peu après que j’eus écrit à Saphir, je remarquai un changement profond dans les manières d’Octavio. Il était encore plus froid, plus pensif que de coutume ; il jetait sur moi des regards muets qui me faisaient trembler jusqu’au fond de l’âme. Et, en même temps, il me semblait que son diamant, qu’il avait toujours à la main, s’obscurcissait peu à peu et perdait de la vivacité de son éclat.

Près d’un mois se passa ainsi. Saphir m’écrivit plusieurs fois ; mais je crus prudent de laisser ses lettres sans réponse, d’autant plus que le ton passionné de son style finissait par me choquer. Octavio se montrait de plus en plus sombre, et enfin son brillant devint tellement pâle, que je ne pus pas croire plus longtemps que ce fût une illusion. J’aurais beaucoup désiré le voir de près, pour m’assurer si cet obscurcissement étranger ne venait pas de quelque malpropreté ; mais Octavio l’avait sans cesse au doigt où j’osais à peine le regarder.

Le comte Arriani couchait toujours avec moi, bien que depuis longtemps il eût cessé presque de m’adresser la parole. Avant de se mettre au lit, il avait coutume d’ôter tous ses anneaux de ses doigts et de les poser sur la table de nuit, à côté d’une petite veilleuse qui restait allumée. Une nuit, je m’en souviens, je le croyais endormi profondément ; la veilleuse ne jetait sous l’alcôve qu’une clarté incertaine et vacillante. Je ne pus résister à la tentation de prendre la bague mystérieuse pour l’examiner. Le diamant me parut devenu comme opaque. Je l’approchai de mon haleine et je le frottai doucement ; mais, loin de s’éclaircir, il devint plus mat encore. Effrayée, j’allais le reposer à sa place, quand, me retournant pour voir si Octavio dormait toujours, j’aperçus ses yeux ouverts qui me considéraient fixement. Il me saisit avec violence