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les bastonnais

— Nous avons beaucoup de moyens pour y arriver.

— C’est bien. Nous avons besoin de vos services.

Nous avons dit que le but de Barbin et de ses compagnons était d’entrer en communication directe avec quelques officiers américains, de leur faire connaître leurs plans d’opération et de s’entendre avec eux pour organiser leurs services. C’est ce qu’ils firent dans le cours d’une plus ample conversation et on leur dit de revenir dans quelques jours pour recevoir des instructions du quartier général directement.

Mais ils avaient un second devoir à remplir, ou plutôt, ce soin incombait à Batoche, comme il en avait informé ses compagnons en se rendant au rendez-vous, après avoir pris tous les renseignements sur tout ce qui s’était passé dans les deux jours qui s’étaient écoulés depuis que les Américains avaient investi Québec. Batoche émit ses idées à peu près comme suit. S’adressant à l’officier, il dit :

— Vous savez que nos compatriotes, à la ville, sont partagés de sentiments ?

— Nous l’avons appris.

— Un parti épouse la cause de l’Angleterre et a formé un régiment pour la défendre.

— Nous savons cela.

— Ce parti est maintenant très animé contre vous.

— Ah !

— Un autre parti favorise la cause de la liberté et de la libération.

— Oui, ce sont nos amis.

— Eh bien, ils sont fort découragés de ce qui est arrivé dernièrement.

— Vraiment ? Comment cela ?

— Puis-je parler librement ?

— Comme un soldat à un soldat.

— Et vous ajouterez foi à mes paroles ?

L’officier fixa un regard sur la figure originale et énergique du vieil ermite et répondit avec assurance :

— Je vous croirai.

— Et vous rapporterez mes paroles à votre commandant ?

— Oui.

— Alors, écoutez-moi. Avant hier, après avoir débarqué sur la côte nord, vous avez déployé vos forces sur les plaines d’Abraham.

Batoche s’étendit sur ces détails et sur d’autres encore qu’il avait appris de Barbin, afin de les faire confirmer par les officiers américains, de manière qu’il n’y eût aucune erreur sur la conclusion qu’il en tirait.