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les bastonnais

— Cary Singleton !

Oubliant tout le reste, dans son transport, elle applaudit de ses mains gantées. Roderick ôta son chapeau et salua.

— C’est un beau spectacle, Pauline, et qui vaut bien la peine que nous avons prise de venir si loin pour en être témoins.

La jeune fille garda le silence, et quand, enfin, elle tourna les yeux, ce ne fut pas pour rencontrer ceux de son compagnon.

Il s’éleva en elle un léger trouble qui aurait pu lui causer de
l’embarras si un autre incident ne s’était produit presque immédiatement pour distraire ses pensées.

Le cavalier, ayant terminé ses exercices, revint vers ses amis qui, après une brève conversation, se dispersèrent, le laissant seul avec un petit groupe de deux ou trois personnes parmi lesquelles apparut une dame à cheval. Du moins, Roderick et Pauline en jugèrent ainsi. Ils n’attachèrent point, néanmoins, d’importance à cette circonstance, et ils étaient sur le point de revenir sur leurs pas et de retourner à la maison, quand ils remarquèrent que deux cavaliers se détachaient du groupe resté en vue et se dirigeaient dans la direction de la plaine. Il était facile de reconnaître Cary Singleton et après quelques instants, il fut tout aussi facile de voir qu’il était accompagné d’une dame. Tous deux se dirigeaient au pas et en droite ligne vers le Saint-Laurent.

Le soleil était encore brillant, et dans leur trajet, ils étaient tantôt dans l’ombre et tantôt dans la lumière, selon qu’ils passaient devant les érables dépouillés de leurs feuilles, qui bordaient la route. Quand ils eurent atteint le plateau élevé surplombant la rivière, ils s’arrêtèrent pour converser quelques instants, Singleton évidemment occupé à décrire quelque chose, comme l’indiquait le mouvement de son bras le long de la ligne marquée par le courant, puis dans la direction de la ville.

Tandis qu’ils étaient ainsi engagés, le couple de la citadelle les