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et sa vue tomba sur Roderick. La vision fut brève, mais la pauvre jeune fille eut néanmoins le temps de se soulever sur son coude et d’agiter faiblement son mouchoir blanc. Roderick vit ce signe d’adieu, et oubliant tout, dans l’enthousiasme du mo­ment, il s’élança sur le bord du parapet. Il se serait précipité en face de mille bayonnettes mena­çantes et se serait frayé un chemin à travers les rangs serrés des ennemis ; mais, hélas ! en regardant de nouveau, il vit que la voiture avait définitivement disparu dans les chemins sinueux de la vallée.

Trop tard, trop tard ! s’écria-t-il. Partie ! Elle est partie pour ne jamais revenir. Adieu à tous mes rêves de bonheur, à toutes mes espérances, à toutes mes aspirations. Il ne me reste qu’une consolation. J’avais sa vie entre mes mains ; en agissant comme je l’ai fait, je l’ai sauvée. Cette réflexion me soutiendra dans ma douleur.

Il se redressa alors, raffermi par la pensée de son dévouement et se dirigea d’un pas ferme vers le lieu où l’appelait le devoir.