Page:Liszt - F. Chopin, 1879.djvu/184

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justice ! Combien il déplaît d’avoir à défendre ce qu’on ne voudrait qu’admirer, d’excuser alors qu’on ne voudrait que vénérer !…

Aussi, quel doux orgueil l’ami n’éprouve-t-il pas à remémorer une carrière dans laquelle, pas de dissonances qui blessent, pas de contradictions qu’on doive indulgencier, pas d’erreurs dont il faille remonter le courant pour en trouver l’excuse, pas d’extrêmes qu’on ait à plaindre comme la conséquence d’un excès de causes. Avec quel doux orgueil l’artiste ne nomme-t-il pas celui dont la vie prouve qu’il n’est pas seulement réservé aux natures apathiques, que ne séduisent aucunes fascinations, que n’attirent aucuns mirages, qui ne sont susceptibles d’aucune illusion, qui se bornent aisément aux strictes observances et aux abstinences routinières des lois honorées et honorables, de prétendre à cette élévation d’âme que ne soumet aucun revers, qui ne se dément à aucun instant ! A ce titre le souvenir de Chopin restera doublement cher aux amis et aux artistes qu’il a rencontré sur sa route, comme à ces amis inconnus que les chants du poëte lui acquièrent ; comme aux artistes qui, en lui succédant, s’attacheront à être dignes de lui !

Dans aucun de ses nombreux replis, le caractère de Chopin n’a recélé un seul mouvement, une seule impulsion, qui ne fût dictée par le plus délicat sentiment d’honneur et la plus noble entente des affections. Et cependant, jamais nature ne fut plus appelée à se