Page:Livre du Chevalier de La Tour Landry.djvu/113

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dist le seigneur, est-ce la manière ? vous ne sçavés autre jeu fère ; estes-vous desvée ? — Sire, dist-elle, j’ay fait vostre commandement ; ne aviez vous pas dit que vostre commandement fuest fait, combien qu’il feust ? je l’ay faict à mon pouvoir, combien que ce feust vostre dommaige et le mien ; car vous m’aviez dit que je saillisse sur la table. — Quoy, dist-il, je disoye : Sel sur table. — En bonne foy, dist-elle, je entendoye y saillir. Lors y ot assés ris et tout prins à bourde, dont les aultres deux marchans vont dire qu’il ne faloit jà commander qu’elle saillist ou bacin, et qu’elle en avoit assez fait et que son seigneur avoit gaaingnié la fermaille, et fut la plus loée de obeir à son seigneur, et ne fut mie batue comme les autres, qui ne vouloient faire le commandement de leurs seigneurs ; car gens voitturiers sy chastient leurs femmes par signes de cops ; et aussy toute gentil femme de son droit mesmes doit l’en chastier et par bel et par courtoisie, car autrement ne leur doit l’en faire.

Et, pour ce, toute gentil femme monstre se elle a franc et gentil cuer ou non, c’est assavoir qui lui monstre par bel et par courtoisie, de tant comme elle aura plus gentil et franc cuer, de tant se chastie elle mieulx, et obeist et fait plus debonnairement le commandement de son seigneur, et a plus grant doubte et paour de luy desobeir. Car les bonnes craignent comme fist la bonne femme au tiers marchant, qui, pour doubte de desobeir à son seigneur, elle sailly sus la table et abaty tout, et ainsi doit toute bonne femme fère, craindre et obeir à son seigneur, et son commandement, soit tort, soit droit, se le commandement