Page:Livre du Chevalier de La Tour Landry.djvu/146

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son seigneur sur tous autres, et laissier toutes autres amours pour celle ; si comme nostre seigneur par sa sainte propre bouche dist que l’on laissast et deguerpist père et mère, suers et frères et toutes autres choses pour l’amour de son seigneur, et que ce n’estoient pas deux chars, fors une, que Dieu avoit conjointe en une et que homme ne povoit separer, c’est-à-dire que homme ne povoit ny ne devoit fourtraire l’amour l’un de l’autre, puisque Dieus et l’esglise les avoit unys et conjoins ensemble. Et encores vous dist vostre mère que vous y prenissiez nourreture comme en ses mamelles, c’est-à-dire et entendre que se que vous amez vostre seigneur sus tous, que ce seroit votre nourriture et vostre bien, et honneur vous accroistra de jour en jour comme l’enfant croist par la nourriture de la mère et de sa mamelle, c’est la doulceur du lait, qui signifie la grant doulceur, la joye et l’amour qui doit estre en loyal mariaige, et la grâce de Dieu y habite. Après vostre père vous dist : Belle fille, pourquoy as-tu plus grant plaisance et plus grant amour à aultre que à ton seigneur ? regarde ce puis qui est delèz toy, et saches, se tu chez au feu de male chaleur, que tu y chierras. C’est-à-dire que, se vous amez plus aultre que vostre seigneur, ne que autres habitent à vous, fors que luy, que vous charrez ou puis, où vous serez arse et bruslée pour le delit de la male plaisance et malle chaleur que vous avez eue ailleurs. Et pour ce vous montra-il le puis de feu et la vengeance et la punition qu’il convient souffrir pour le delit de celle folle plaisance. Après ilz vous monstrèrent les prestres