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— Oh ! Madame !

— Allons, c’est promis, vous viendrez, n’est-ce pas ?

Il fallait bien promettre et je promis. Ce sera une distraction pour Jeanne, pensais-je, et peut-être…

Quand la baronne et son fils nous eurent quittées :

— Comment as-tu trouvé le baron de Vestel, mignonne ?

— Mais, je ne l’ai pas trouvé du tout, sœur, dit la malicieuse, il se dérobait.

Tiens-tu à ce que je le découvre ? Je te le promets pour la prochaine rencontre.

— La femme qu’il choisira sera une heureuse femme ; sa mère est une heureuse mère, et c’est un présage.

Jeanne feignit de ne pas comprendre, mais elle avait compris, car ses joues avaient rougi, et elle s’était détournée pour me le cacher.

Elle resta songeuse, et moi je la voyais, dans un avenir prochain, l’heureuse compagne d’un homme supérieur dont le passé me répondait de l’avenir.


Septemtre. — Il pleuvait ce matin, la pluie à la campagne a un charme d’une mélancolie inexprimable. Elle tombait fine et douce, sans bruit, remplissant les lointains d’un voile bleuâtre ; estompant les contours, unissant d’une ligne invisible la terre au ciel. Ce n’est pas la pluie triste et fangeuse des villes, ici elle brille sur les feuillées et efface toute souillure ; elle attache à chaque pétale une perle irisée ; elle exhale les parfums de l’herbe et des fleurs et nous apporte du bois voisin d’exquises senteurs.

À midi, un gai rayon a percé le nuage, et je suis allée voir mes roses qui refleurissent pour la seconde fois ; elles n’avaient pas eu ma visite ordinaire du matin ; je savais que la Gloire de Dijon devait ouvrir de nouveaux boutons et que ma blanche Madame Hardy serait complétement épanouie dans sa collerette de mousse. J’y suis courue seule sans attendre que les sentiers soient sèches.

Que Dieu soit béni, qui crée ces merveilles pour la fête de nos yeux !

— Mam’selle Germaine, crie une petite voix aigrelette de l’autre côté de la haie.

Ce sont les enfants du village, à qui je donne parfois des fleurs ; ils m’ont vue dans les rosiers. Je les fais entrer et leur remplis les bras de branches fleuries en leur faisant admirer les couleurs, le parfum des roses, les gouttes d’eau dont elles sont encore couvertes.

En revenant, je trouvai Jacques lisant sur un banc adossé