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Page:Luigi - Le Don Quichotte montréalais sur sa rossinante, 1873.djvu/43

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et leurs pasteurs. Ce n’est pas saisir la pensée du saint abbé, qui n’a jamais conseillé au Pape de renoncer à son pouvoir, mais qui désirait que ce pouvoir fut employé non pour le luxe et pour l’orgueil, mais pour la fin qui l’avait fait naître, c’est-à-dire pour la liberté de l’Église et le salut des âmes. Saint Bernard avait les idées les plus justes et les plus élevées sur la politique ou l’art de gouverner les peuples. Pour lui, Dieu seul est proprement Souverain. Le Fils de Dieu fait homme, le Christ, en naissant, a été investi par son Père de cette puissance souveraine. Parmi les hommes, il n’y a de puissance ou droit de commander, si ce n’est de Dieu et par son Verbe. Le Fils de Dieu fait homme, Jésus-Christ est tout à la fois Souverain Pontife et Roi Souverain ; il réunit dans sa personne, et par là même dans son Église, et le sacerdoce et la royauté. Mais le sacerdoce est un, comme Dieu est un, comme la Foi est une, comme l’Église est une, comme l’humanité est une ; la royauté est multiple comme les nations ; la royauté est fractionnée entre plusieurs rois indépendants les uns des autres, comme l’humanité est fractionnée entre plusieurs nations indépendantes les unes des autres. Mais ces nations si diverses sont ramenées et à l’unité humaine et à l’unité divine par l’unité de la foi chrétienne, par l’unité de l’Église catholique, par l’unité de son sacerdoce. Le devoir, l’honneur, la prérogative du premier roi chrétien, tel qu’était l’Empereur, c’est d’être le bras droit et l’épée de la chrétienté pour défendre tout le corps, principalement la tête, et seconder son influence civilisatrice et au-dedans et au-dehors. Voilà la politique vraiment royale, à la fois humaine et divine, politique dont le moyen-âge entrevit la grandeur, et à laquelle il faudra se rattacher quand on voudra faire de grandes et d’utiles choses. »

Ce n’est donc pas en découpant une bribe quelconque, plus ou moins bien traduite d’un passage de saint Bernard, qu’on peut connaître à quel point de vue cet illustre abbé a parlé du pouvoir temporel du Pape. Il faut ou citer ou analyser exactement tout le passage qui se rapporte à cette importante question. Voilà ce que vous auriez dû faire, mais ce que vous n’avez pas fait par