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Page:Mémoires du Baron de Marbot - tome 1.djvu/111

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EN RETRAITE.

me défendre d’accepter. J’obéis ; mais comme mon père avait écrit dans le même sens au général Suchet, chef d’état-major, celui-ci lui ayant répondu que le général en chef se trouverait certainement blessé qu’un de ses généraux de division eût la prétention de désapprouver les nominations qu’il avait faites en vertu de pouvoirs à lui conférés par le gouvernement, mon père m’autorisa à accepter, et je fus reconnu sous-lieutenant le 10 nivôse an VII (décembre 1799).

Je fus un des derniers officiers promus par le général Championnet, qui, n’ayant pu se maintenir en Piémont devant des forces supérieures, se vit contraint de repasser l’Apennin et de ramener l’armée dans la Ligurie. Ce général éprouva tant de douleur, en voyant une partie de ses troupes se débander, parce qu’on ne lui donnait plus le moyen de les nourrir, qu’il mourut le 25 nivôse, quinze jours après m’avoir fait officier. Mon père, se trouvant le plus ancien général de division, fut provisoirement investi du commandement en chef de l’armée d’Italie, dont le quartier général était à Nice. Il s’y rendit et s’empressa de renvoyer en Provence le peu de cavalerie qui restait encore, car il n’existait plus aucune provision de fourrages en Ligurie. Le 1er de housards rentra donc en France, mais mon père me retint pour remplir auprès de lui les fonctions d’aide de camp.

Pendant notre séjour à Nice, mon père reçut du ministre de la guerre l’ordre d’aller prendre le commandement de l’avant-garde de l’armée du Rhin, où son chef d’état-major, le colonel Ménard, devait le suivre. Nous fûmes tous fort satisfaits de cette nouvelle situation, car la misère avait jeté les troupes de l’armée d’Italie dans un tel désordre qu’il paraissait impossible de se maintenir en Ligurie ; mon père n’était pas fâché de s’éloigner d’une armée en décomposition, qui allait ternir ses lau-