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Page:Mémoires du Baron de Marbot - tome 1.djvu/207

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BIOGRAPHIE D’AUGEREAU.

ciers et de sous-officiers instructeurs, auxquels il donnerait le grade supérieur au leur. M. le comte de Pommereul, qui devint plus tard général et préfet de l’Empire, fut le directeur de tous les instructeurs envoyés à Naples. Augereau fit partie de ce détachement, et reçut le grade de sous-lieutenant, en arrivant à Naples. Il y servit plusieurs années, et venait d’être fait lieutenant, lorsque, s’étant épris de la fille d’un négociant grec, il la demanda en mariage. Celui-ci n’ayant pas voulu consentir à cette union, les deux amants se marièrent en secret, puis, montant sur le premier navire qu’ils trouvèrent en partance, ils se rendirent à Lisbonne, où ils vécurent paisiblement pendant quelque temps.

On était à la fin de 1792. La Révolution française marchait à grands pas, et tous les souverains de l’Europe, redoutant de voir introduire dans leurs États les principes nouveaux, étaient devenus fort sévères pour tout ce qui était Français. Augereau m’a souvent assuré que pendant son séjour en Portugal, il n’avait jamais rien fait, ni dit, qui pût alarmer le gouvernement ; il fut cependant arrêté et conduit dans les prisons de l’Inquisition ! Il y languissait depuis quelques mois, lorsque Mme Augereau, femme d’un grand courage, ayant vu entrer dans le port un navire avec un pavillon tricolore, se rendit à bord, pour remettre au capitaine une lettre par laquelle elle informait le gouvernement français de l’arrestation arbitraire de son mari. Bien que le capitaine du navire français n’appartînt pas à la marine militaire, il se rendit résolument auprès des ministres portugais, réclama son compatriote détenu à l’Inquisition, et sur leur refus, il leur déclara fièrement la guerre au nom de la France ! Soit que les Portugais fussent effrayés, soit qu’ils comprissent qu’ils avaient agi injustement, Augereau fut rendu à la liberté et revint au Havre, ainsi