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Page:Mémoires du Baron de Marbot - tome 1.djvu/238

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MÉMOIRES DU GÉNÉRAL DE MARBOT.

étaient encore fort loin, lorsque le feld-maréchal Mack, à la tête de quatre-vingt mille hommes, s’étant imprudemment avancé en Bavière, y fut battu par Napoléon, dont les savantes manœuvres le contraignirent à se réfugier dans la place d’Ulm, et à mettre bas les armes avec la plus grande partie de son armée, dont deux corps seulement échappèrent au désastre.

L’un, sous les ordres du prince Ferdinand, parvint à gagner la Bohême ; l’autre, commandé par le vieux feld-maréchal Jellachich, se jeta dans le Vorarlberg, vers le lac de Constance, où il s’appuyait à la neutralité suisse et gardait les défilés de la forêt Noire. C’est à ces dernières troupes que le maréchal Augereau allait être opposé.

Après avoir traversé le Rhin à Huningue, le 7e corps se trouva dans le pays de Bade, dont le souverain, ainsi que celui de Bavière et de Wurtemberg, venait de contracter une alliance avec Napoléon ; aussi fûmes-nous reçus en amis par la population de Brisgau. Le feld-maréchal Jellachich n’avait pas osé se mesurer avec les Français dans un pays où les communications sont si faciles, mais il nous attendait au delà de Fribourg, à l’entrée de la forêt Noire, dont il comptait nous faire acheter le passage par beaucoup de sang. Il espérait surtout nous arrêter au Val d’Enfer, défilé étroit, fort long, et dominé de tous côtés par des rochers à pic, faciles à défendre. Mais les troupes du 7e corps, qui venaient d’apprendre les brillants succès remportés par leurs camarades à Ulm et en Bavière, jalouses de montrer aussi leur bravoure, s’élancèrent avec ardeur dans la forêt Noire, qu’elles franchirent en trois jours, malgré les obstacles du terrain, la résistance de l’ennemi et la difficulté de se procurer des vivres dans cet affreux désert. Enfin, l’armée déboucha dans un pays fertile et