Page:Mérimée - Théâtre de Clara Gazul, 1857.djvu/238

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La Perichole.

Que je vous dise ?…

Le Vice-Roi.

Que tu n’es plus fâchée, et que tu me pardonnes mon emportement.

La Perichole lui donnant la main.

Oui, je vous pardonne ; car je crois que vous m’aimez véritablement.

Le Vice-Roi.

Au moins, par générosité… Je suis bien sûr de toi… Je ne suis plus jaloux… Mais, est-ce que cela te coûterait beaucoup de dire qu’on t’a calomniée ?

La Perichole.

Quoi ! toujours vous en revenez là ?

Le Vice-Roi.

Allons ! voilà qui est dit… n’en parlons plus… Je te crois sans que tu te défendes… Pourtant… Vois, comme je suis faible !

La Perichole.

En vérité, monseigneur, faut-il vous montrer à quel point la jalousie vous a troublé la raison ? Voyons : cherchons à nous rappeler vos reproches. Ah ! la robe de satin cramoisi ?… Bon Dieu, quelle idée !

Le Vice-Roi.

Oui, cela était ridicule ; mais…

La Perichole.

Il est parfaitement vrai que je possède une robe de satin cramoisi, et il est non moins vrai que je l’ai achetée d’une fille de couleur, ma voisine, qui est entretenue par le capitaine Aguirre. Avait-elle reçu cette robe de son amant ou d’un autre, c’est ce que j’ignore… C’est ma femme de chambre, qui a fait le marché, et vous pouvez l’interroger là-dessus.

Le Vice-Roi.

Je m’en garderai bien, mon enfant !… Je te crois. (À part.) Ah ! coquin de Martinez, tu me paieras l’imposture.

La Perichole.

Quant à l’autre histoire du capitaine Aguirre, je n’ai rien à vous dire, sinon que les accidents de cette espèce sont communs à Lima, et que je ne puis les empêcher. D’ailleurs, je crois me souvenir que ce jour-là même vous êtes resté fort tard à souper chez moi.

Le Vice-Roi.

Perichole, ma mignonne, je ne veux plus entendre un mot là-dessus. Cela me rend trop honteux… Dieu merci, je ne suis plus jaloux… Tu disais donc que ce cholo…

La Perichole.

Vos espions vous ont aussi bien instruit relativement au cholo Ramon. Il est vrai qu’aux dernières courses je fus transportée d’admiration en voyant son