Page:Malebranche - De la recherche de la vérité.djvu/619

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dre ne peut recevoir que le mouvement auquel la matière subtile s’accorde ; car l’eau ne communique au bateau que le mouvement direct qui est commun à toutes les parties, et ce mouvement là est d’ordinaire très-petit par rapport aux autres.

Je pourrais encore prouver la grandeur du mouvement de la matière subtile à ceux qui reçoivent les principes de M. Descartes, par le mouvement de la terre et la pesanteur des corps, et je tirerais même de là des preuves assez certaines et assez exactes, mais cela n’est pas nécessaire à mon sujet. Il suffit, afin que, sans avoir vu les ouvrages de M. Descartes, on ait une preuve suffisante de agitation de la matière subtile, que je donne pour cause de la dureté des corps, il suffit, dis-je, de lire avec quelque application ce que j’en ai déjà dit.

Étant donc présentement délivrés des préjugés qui nous portaient à croire que nos efforts sont bien puissants, et que celui de la matière subtile qui environne les corps durs et qui les comprime est fort faible, étant d’ailleurs persuadés de l’agitation violente de cette matière par les choses que j’ai dites de la poudre à canon ; il ne sera pas difficile de voir qu’il est absolument nécessaire que cette matière, agissant infiniment plus sur la surface des corps durs qu’elle environne et qu’elle comprime, qu’au dedans des mêmes corps, elle doit être cause de leur dureté ou de cette résistance que nous sentons lorsque nous nous efforçons de les rompre.

Or, comme il y a toujours beaucoup de parties de cette matière invisible qui passe par les pores des corps durs, elles ne les rendent pas seulement durs comme nous venons d’expliquer, mais de plus elles sont causes qu’il y en a quelques-uns qui font ressort et se redressent, d’autres qui demeurent ployés, d’autres qui sont fluides et liquides ; et enfin, elles sont cause non-seulement de la force que les parties des corps durs ont pour demeurer les unes auprès des autres. mais aussi de celle que les parties des corps fluides ont de s’en séparer, c’est-à-dire que c’est elle qui rend quelques corps durs, et quelques autres fluides ; durs, lorsque leurs parties se touchent immédiatement ; fluides, lorsque leurs parties ne se touchent point.

Mais, parce qu’il est absolument nécessaire de savoir distinctement la physique de M. Descartes. la figure de ses éléments et des parties qui composent les corps particuliers, pour rendre raison d’où vient que de certains corps sont roides, et que quelques autres sont pliants, je ne m’arrêterai point à l’expliquer. Ceux qui ont lu les ouvrages de ce philosophe, imagineront assez facilement ce qui peut en être la cause, ce que je ne pourrais expliquer que