Page:Marguerite de Navarre - Lettres, éd. Génin, 1841.djvu/106

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NOTICE

a on bien croire que, sans nécessité, ma coutume « n’est point de demander. » A quel langage était réduite la reine de Navarre ! A partir de ce moment, la vie de Marguerite ne fut plus qu’amertume et tristesse. Au spectacle de ces contrastes de fortune, Brantôine lui-même, cet écrivain tout sensuel, se laisse gagner à la mélancolie, et le passage suivant, écrit pour la seconde Marguerite, s’applique avec une égale justesse à notre reine de Navarre ?. « Il ne luy « manque qu’une chose : qu’elle n’est aultant heu «  reuse en ce monde comme ses mérites le requièa rent, et que ses plus affectionnés serviteurs sou2

Je saisis cette occasion de signaler quelques-uns des points de ressemblance par lesquels le sort semble s’être amusé à rapprocher la sour de François ler et la femme d’Henri IV. Toutes deux avaient inême prénom, même nom même titre : Marguerite de Valois, reine de Navarre ; toutes deux vivaient dans le même siècle

; toutes deux belles, savantes et spirituelles, protégeant les

lettres et les lettrés ; toutes deux également accusées, au moins par les historiens modernes, d’avoir eu l’humeur trop galante. Il n’est pas jusqu’aux noms des lieux habités par elles, qui ne tendent à se confondre : la reine de Navarre, sæur de François Jer, s’était retirée à Tusson ; la reine de Navarre, femme d’Henri IV, habitait Usson. Ce jeu du hasard, si singulier qu’il semble le résultat d’une combinaison, explique et excuse jusqu’à un certain point les méprises dont ces deux princesses ont été l’objet. Les écrivains contemporains eux-mèmes, Brantôme, par exemple, ne prenant pas toujours le soin de les distinguer nettement, il est assez diflicile de se garantir de toute surprise.