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LETTRES INÉDITES

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LETTRES INÉDITES on me rebat de sollicitations de vous escrire, ou plus tost l’on me tance parceque mes lettres ne vont pas déranger Vostre Majesté. Outre que je suis un homme escrasé d’affaires, je n’ay nul subject de vous escrire, et aussy je sçay bien que vos occupations ne vous laissent le loisir de lire des lettres inutiles. Car celle que

à la persuasion de ces mesmes personnes je vous ay naguères envoyée, je n’y ai receu aucune autre response que d’un simple bonjour. On dict que vous m’avez escript depuis peu par un certain Polonois que

la mort a surpris en chemin ; s’il est vray, je ne sçay. Je souhaiterois la prospérité des gens respondist

à leur piété ; mais celuy qui dirige toutes choses au profit de ceux qu’il aime, sçait ce qu’il nous faut, et quand il lui paroistra bon, tournera subitement les affaires à une heureuse fin ; et quand la prudence humaine sera le plus désespérée, alors surtout se revelera l’impénétrable sagesse de Dieu. Celuy qui de cæur a planté en lui l’ancre de son espérance, il ne luy peut survenir accident qu’en la vue de son bien. Il faut donc nous remettre de tout à Dieu. En ce qui vous touche, il convient plus tost vous rendre des actions de graces de ce que vous faictes que d’employer l’éperon des conseils pour vous inciter à toujours protéger contre la malice des meschans les bonnes lettres et les sincères amis du Christ, lesquels vous doivent déjà beaucoup ainsy qu’à vostre frère, le Roy très chrestien, et à madame vostre très pieuse et très

sage mère. Je souhaite que le Seigneur Jésus envoye à tous une entière félicité. Si vous avez quelque