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DE LA REINE DE NAVARRE.

89. — AU MÊME. (Nérac, 1530 ?)

Mon nepveu, je vous envoye ce porteur pour entendre s’il est rien venu du legat d’Avignon, et vous prie l’avoir pour recommandé’, comme j’ay ma fiance en vous. Aussy pourceque le compéditeur de maistre Gérard 2 en l’abbaye que vous luy avés faict donner I Ce porteur.

  • Gérard Roussel (ou le Roux), savant célèbre et théologien ; un

des protégés de la reine de Navarre qui ont le plus contribué à la faire accuser d’hérésie. C’était un moine dominicain, qui, ayant déposé l’habit de son ordre, se mit à voyager en Allemagne, où il paraît s’être imbu des doctrines de Luther. D’autres ont soutenu qu’il n’avait aucunement adopté ni celles de Luther, ni celles de Calvin. A son retour, il fut persécuté par les Sorbonistes ; Marguerite le tira de prison, lui offrit un asile en Béarn, et lui fit donner l’abbaye de Clairac, dont il est ici question, et l’on voit que ce fut par

l’entremise du grandmaître de Montmorency. Plus tard, en 1540, la Reine fit nommer G. Roussel à l’évêché d’Oloron. Il ne survécut guère à sa bienfaitrice. Sponde, qui accuse Roussel d’avoir corrompu la religion du pays basque, nous apprend les circonstances de sa mort : Gérard Roussel était allé prêcher à Mauléon, en 1550. Il s’élevait surtout contre le chômage des fêtes des saints et en demandait l’abolition. Un fanatique, nommé Arnauld de Maytie, s’approche de la chaire, et en coupe les supports avec une hache qu’il avait apportéc sous ses habits. La chaire tombe, l’évêque est relevé à demi mort et reporté dans le Béarn. On lui ordonna les eaux ; il partit pour les aller prendre, et mourut en chemin. Arnauld, traduit devant le parlement de Bordeaux, fut acquitté. Peu après le ciel le récompensa dignement de sa pieuse et belle action, ut de pio ct eximio facinore convenientissime remuneraretur : son fils fut nominé évêque d’Oloron en place de Gérard Roussel, as-