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SUR MARGUERITE D’ANGOULÊME.

SUR MARGUERITE D’ANGOULÊME. se coula par cette trapelle en la ruelle du lit de la princesse. Mais cette surprise n’eut pas tout le succès espéré par l’inventeur. Marguerite, éveillée en sursaut, fit si bonne et vigoureuse défense, que le chercheur d’aventures fut obligé de faire retraite sans autre bénéfice, sinon des esgratigneures dans son beau visaige. Pour n’avoir pas à en expliquer l’origine, il contrefit le malade et garda la chambre jusqu’au départ de la compagnie. Marguerite, très-irritée, voulait d’abord se plaindre à son frère, qui n’eût pas manqué de la venger d’une manière éclatante, quoique Bonnivet fût son favori. Mais la vieille et prudente madame de Châtillon, qui avait élevé la princesse et était restée sa dame d’honneur, combattit sa résolution par un beau discours qu’on peut lire dans la quatrième Nouvelle de la reine de Navarre, lui remontrant qu’il est de certains actes de vertu qui donnent prise à la médisance, et qu’enfin Sur telles affaires toujours Le meilleur est de ne rien dire. Marguerite fut docile aux conseils de l’expérience, et se garda le secret de sa belle conduite. Longtemps après, lorsque la mort de Bonnivet, tué à Pavie, rendit l’indiscrétion sans danger, cette histoire fut révélée. Brantôme la sut de sa