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Mon fermier entra pendant qu’elle me tenait ce discours. Venez, monsieur Viilot, lui cria-t-elle ; je parlais de vous tout à l’heure ; vous venez pour emmener Tervire, mais je la retiens ; vous me la cédez volontiers, n’est-ce pas ? Je manderai à la marquise qu’elle est chez moi. Combien vous est-il dû pour elle, dites ? Je vous paierai sur-le-champ.

Eh ! mon Dieu, madame, cette affaire-là ne presse pas, reprit M. Villot. Pour ce qui est de notre jeune maîtresse, il est juste que vous l’ayez, puisque vous la voulez, je ne saurais dire non ; et dans le fond j’en suis bien aise à cause d’elle, parce qu’elle sera avec sa bonne tante ; mais cela n’empêchera pas que je ne m’en retourne triste ; et nous allons être bien étonnés, madame Villot et moi, de ne la plus voir dans la maison ; car, sauf votre respect, nous l’aimions comme notre enfant, et nous l’aimerons toujours de même, ajouta-t-il presque la larme à l’œil. Et votre enfant vous le rend bien, lui répondis-je aussi tout attendrie.

Vous ne la perdez pas, vous la reviendrez voir quand il vous plaira, dit madame Dursan que notre attendrissement touchait à son tour.

Nous profiterons de la permission, répondit M. Villot. Je l’embrassai sans façon et de tout mon cœur, et le chargeai de mille amitiés pour sa femme, que je promis d’aller voir le lendemain ; après quoi il partit.

FIN DE LA NEUVIÈME PARTIE.