Page:Marlès - Histoire de l’Inde ancienne et moderne, 1828, tome 6.djvu/189

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serai ; la crainte de devenir la proie des tigres sembla leur rendre un peu de vigueur. Ce ne fut pas toutefois sans la plus grande peine que Chaja parvint à placer sa femme sur le cheval ; mais elle eut beau essayer de prendre son enfant dans ses bras, elle était si faible quelle le laissait échapper. Son mari fit à son tour d’inutiles efforts pour le soutenir dans les siens ; il ne pouvait faire un pas sans succomber.

Cependant le soleil descendait vers l’horizon ; la nuit allait bientôt les surprendre en ce triste lieu, il fallait s’en éloigner sans délai où se résoudre à périr. Après de pénibles combats entre la tendresse naissante pour leur enfant et la dure nécessité qui les contraignait à l’abandonner, Chaja fit un lit de feuillage au pied de l’arbre, y déposa sa fille, et la recommandant à la providence se remit en route avec sa femme tout éplorée. Ils n’avaient pas fait un quart de lieue que celle-ci, vaincue par la douleur, se laissa tomber de cheval, en s’écriant : Ma fille ! ma fille ! Le malheureux Chaja retrouva dans son amour pour elle un moment d’énergie qui rappela ses forces éteintes. Il la secourut, la consola, lui promit qu’il lui rendrait sa fille et partit pour aller la chercher. À mesure qu’il s’approchait de l’arbre fatal, ses yeux inquiets cherchaient le berceau de feuillage. Le premier ob-