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Le pays eut pu jouir alors d’une certaine tranquillité ; malheureusement le nabab n’ayant plus rien à craindre de ses ennemis, se livra à une tyrannie plus cruelle que jamais, sous le prétexte de récupérer les frais que la guerre lui avait occasionnés. Ses vexations furent telles que les Européens en vinrent à regretter les Marates ; par crainte de son insatiable avidité, on n’osait plus risquer l’envoi de fonds dans le pays ni passer de contrats avec les marchands et ceux-ci n’étaient pas sûrs de pouvoir livrer leurs produits : sans aucun motif, les gens d’Aliverdi Khan arrêtaient nos goumastas ou commissionnaires dans les harams ou centres de fabrication.

Nos opérations commerciales continuèrent néanmoins à peu près comme à l’ordinaire. La Compagnie avait envoyé en 1743 2.110.000 rs. au Bengale avec deux navires, l’Argonaute et le Penthièvre : elle en envoya 1.600.000 en 1744 avec un seul, le Neptune. En raison de la guerre avec les Anglais, il ne fut plus possible, les années suivantes, de correspondre avec la France ni même avec Pondichéry, et Chandernagor dut vivre en partie avec ses seules ressources.

On verra plus loin dans quelles conditions cette guerre affecta le Bengale. Il suffira de dire ici qu’en dépit de la neutralité spéciale qui devait y régner, deux vaisseaux Anglais, le Preston et le Lively, sous les ordres de lord Northesk, vinrent s’embosser à l’embouchure de l’Hougly à la fin d’août 1745 et qu’ils y restèrent jusqu’en octobre. Nos navires confiants dans les traditions suivies jusqu’alors, se firent capturer comme dans une souricière. L’Heureux et le Dupleix, venant respectivement de Surate et de Moka, furent pris les 2 et 26 septembre, en même temps que les bots qui attendaient nos vaisseaux en rade de Balassore. Le Chandernagor, appar-