Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 2.djvu/247

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déjà à se glisser dans notre diplomatie et nos institutions ? La Bourdonnais se déclarait toutefois prêt à porter les premiers coups si telle était aussi l’opinion de Dupleix ; il avait à sa disposition quatre vaisseaux armés de 96 canons avec 950 hommes d’équipage et, s’il retenait deux vaisseaux d’Europe envoyés dans l’Inde, cet effectif serait de 1.800 hommes, avec lesquels on pouvait faire un coup d’éclat ; il armerait alors moitié pour la Compagnie et moitié pour lui-même et pour Dupleix, si ce dernier y consentait. Les Anglais étant momentanément hors d’état de rien faire à Moka ni en Perse, il leur serait aisé à l’un et à l’autre d’y porter ce qu’ils voudraient et ils y trouveraient de plus l’avantage d’amariner chemin faisant, tout ce qu’ils rencontreraient. La Bourdonnais, dont l’imagination était prompte et variée, comptait ainsi tirer avec Dupleix le meilleur parti des événements :

« Je compte sur vous avec confiance, lui écrivait-il le 12 septembre, comme vous devez compter sur moi de galant homme à galant homme. Ne croyez pas qu’une affaire particulière puisse jamais influer sur ma façon de penser en général ; dès que l’honneur et le bien du service parlent, je ne compte plus rien : agissez de même à mon égard et puisque la guerre peut prolonger ici mon séjour plus que je ne me le proposais, je vous demande encore derechef votre amitié ; comptez sur la mienne ; de notre union seule dépend toute notre force et c’est par une mutuelle et sincère intelligence que nous pouvons résister à nos ennemis, soutenir l’honneur de notre nation, les intérêts de la Compagnie et remplir ce que nous devons à nous-même. » (A. C. C2 81, p. 4).

Dans une autre lettre du lendemain, la Bourdonnais exposait à Dupleix un plan plus hardi ; il ne s’agissait de rien moins que d’envoyer croiser trois vaisseaux à 30 lieues au vent de Sainte-Hélène et y enlever les vais-