Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 2.djvu/255

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lité, non seulement n’enverrait aucune force capable de balancer celles des Anglais, mais continuerait d’armer comme à l’ordinaire pour les mers de l’Inde et de Chine en exposant ainsi ses vaisseaux aux pires dangers, la Bourdonnais se trouva fort perplexe. Il avait en tout à sa disposition cinq navires avec 1.000 blancs et 3 à 400 noirs. Depuis que les Anglais avaient échappé aux surprises d’une attaque brusquée, il ne pouvait plus avec d’aussi faibles effectifs envoyer des corsaires de tous les cotés et il déclina pour le moment les offres de Dupleix. Mais, dans sa pensée, c’était un simple ajournement ; il comptait recevoir fin mai des renforts de la Compagnie, alors il partirait pour Mahé avec toutes ses forces et selon les nouvelles que Dupleix lui aurait fait parvenir, il se déciderait sur ce qu’il devrait entreprendre. L’idée de l’attaque de Madras devait naturellement se présenter à son esprit ; il s’en expliqua avec Dupleix par lettres des 16 et 24 mai 1745.

« Je ne renonce pas, disait-il, à l’idée que mon frère (Mahé de la Villebagne, conseiller ad honores au Conseil supérieur de Pondichéry) vous avait communiquée de ma part à votre arrivée à Pondichéry et si une fois nous étions assez supérieurs aux Anglais pour n’avoir rien à craindre de leurs vaisseaux, je me déterminerais avec d’autant plus d’empressement que ce coup de main réparerait toutes nos pertes ; car si peu que vous vouliez m’aider, je suis presque certain du succès en réunissant 2.000 européens avec 2 ou 300 cipayes ou pions pour battre la campagne… Si l’idée vous paraissait susceptible d’exécution, vous vous souvenez de tout ce que je vous ai demandé, surtout il nous faut Paradis, beaucoup de chelingues et de cipayes ; enfin quelques choses que nous entreprenions, le principal selon moi est, dès que vous verrez paraître le vaisseau en question (celui sur lequel la Bourdonnais devait arriver incognito), de faire barrer tous les passages par une