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dans le même palais l’homme qui venait peut-être de se débarrasser du jeune fils de Sabder Ali par un assassinat : mais Dupleix n’était pas le maître de l’heure et la politique a ses exigences. Précisément parce qu’elle n’avait pas été provoquée, la visite d’Anaverdi Khan pouvait avoir une heureuse signification ; elle prouvait, dans les circonstances où elle se produisait, que, si nous étions malheureux sur mer, ces malheurs n’étaient point considérés comme irréparables par les Indiens eux-mêmes et que notre prestige politique, préparé par le gouverneur Dumas, était resté complètement intact. Dupleix, pris au dépourvu, fixa la visite au lendemain et s’attacha à lui donner le plus d’éclat possible. Bien qu’il eut peu de troupes à sa disposition, il les disposa de façon à donner l’illusion du nombre ; on en trouvait partout.

Le nabab quitta son camp vers midi par une chaleur épouvantable ; Dupleix l’attendait à l’une des portes de la ville. Les deux hommes s’abordèrent avec le cérémonial oriental, qui était alors d’une pompe magnifique. On tira le canon et l’air retentit de joyeuses acclamations. Le nabab, charmé, déclara à Dupleix qu’il le considérait comme son fils et qu’il se trouvait lui-même en sûreté à Pondichéry aussi bien qu’au milieu de ses troupes. Dupleix, précédé d’une suite nombreuse et bien ordonnée, lui fit voir tout ce qui lui paraissait digne d’être montré, puis il lui offrit à son hôtel une collation et des présents. Le nabab repartit le même jour à neuf heures du soir (11 septembre).

Cette visite, presque à la vue de l’escadre anglaise, rendit un peu de courage aux Indiens, impressionnés par nos désastres et par des bruits inquiétants. Ne disait-on pas que les Anglais et le nabab devaient attaquer simultanément Pondichéry les uns par mer, l’autre par terre et