Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 2.djvu/328

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souvent assez tristes ? Assurément ces incidents eurent tous pour cause générale la divergence d’opinion des deux chefs sur la politique à suivre, mais ils tinrent aussi à l’opposition de leurs caractères qui les rendit plus aigus ; or, s’il est vrai que si les idées de Dupleix nous ont paru plus rationnelles, il nous paraît aussi que dans ses rapports avec la Bourdonnais, ce fut lui le plus dur et le plus acerbe. S’il eut le plus souvent raison dans ses observations, il n’usa jamais de bienveillance, rarement de mesure et pas toujours de franchise. Ses agents, attentifs à épier ses désirs et dont quelques-uns avaient ses confidences, étaient plus intraitables encore ; ils manquaient volontiers aux simples convenances. Leurs lettres ou rapports, que nous avons pour la plupart, font souvent douter de leur impartialité et n’attestent pas toujours leur véracité.

Aussi n’est-ce pas sans quelque peine que nous nous engageons dans le récit de ces incidents qui sont presque tous sans grandeur, sinon sans intérêt. Outre la difficulté d’exposer comme on le désirerait des événements qui s’accomplirent en des lieux différents ou s’entremêlèrent souvent avec une extrême rapidité et dans une grande confusion, il est plus difficile encore de les juger ou plutôt d’en juger les acteurs, qui pour des causes fortuites et changeantes purent alternativement avoir tort ou raison sur des questions de détail ; mais est-il nécessaire de les juger ? et ne vaut-il pas mieux laisser ce soin au lecteur qui tirera lui-même des événements les conclusions qui lui paraîtront les plus équitables ?