Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 2.djvu/403

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Là encore Dupleix vit avec clairvoyance la solution qui s’imposait, c’est-à-dire le maintien de l’escadre dans l’Inde et avec sa décision habituelle il agit en conséquence.

Dès le 17 octobre, il proposa à la Bourdonnais un projet de répartition des vaisseaux, sans cependant le lui imposer ; il se rappelait dans quelle fausse situation il s’était trouvé le 4 octobre lorsqu’il voulut instituer le conseil provincial de Madras, mais n’eut pas les moyens de l’installer. L’intention des capitaines d’exécuter d’abord les ordres qui leur seraient donnés par la Bourdonnais lui conseillait la prudence.

La Bourdonnais avait prescrit à Dordelin et à ses deux collègues de venir le rejoindre à Madras aussitôt qu’ils seraient prêts, c’est-à-dire qu’ils seraient lestés et auraient tous les vivres et l’eau nécessaires. Il n’est pas absolument certain que Dupleix ait travaillé de toutes ses forces à les mettre en état de partir ; tantôt il manquait de câbles ou cordages et tantôt de chelingues — et les chelingues, dont une partie avait été envoyée à Madras, faisaient effectivement défaut. La Bourdonnais soupçonnait que ce n’étaient là que de mauvais prétextes pour empêcher les vaisseaux de venir le rejoindre ; et peut-être n’avait-il pas tort. Dupleix pouvait aisément supposer que s’il laissait partir ses navires, il n’en reverrait aucun. La Bourdonnais impatienté donna enfin à ses capitaines l’ordre de demander formellement les vivres et autres choses dont ils auraient besoin, et déclara à Dupleix que s’il disposait des vaisseaux comme il paraissait vouloir le faire, c’était sous sa responsabilité ; quant à lui, il partirait directement pour les îles ; la Compagnie et le roi jugeraient ensuite qui avait bien ou mal fait (Mémoire, n° 179).