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là que Dupleix les attendait. Par le premier des articles complémentaires du traité du 21 octobre, — le seul qu’il eut admis — il ne s’était engagé à tenir sa parole qu’autant que les Anglais tiendraient la leur. Or il savait qu’ils continuaient à entretenir avec l’ennemi des intelligences secrètes. La Bourdonnais lui-même l’avait reconnu dans une lettre du 27 octobre : « Je ne suis point étonné, disait-il à Dupleix, de voir les Maures nous barrer le chemin de Madras. Ce peuple excité soit par les Anglais ou autrement, cherchera ses avantages. On devait s’y attendre. » (Mém., n° 202). Il est vrai que la Bourdonnais se hâtait d’ajouter qu’il ne voyait pas en quoi les Anglais « blessaient » par là la capitulation. D’après lui, ils étaient toujours nos ennemis et Dupleix devait comprendre qu’ils feraient jouer tous les ressorts possibles pour nous nuire « sans pour cela manquer à ce qu’ils ont promis pour Madras. »

La Bourdonnais soutenait déjà la thèse si brillamment reprise de nos jours qu’un vaincu peut impunément tout se permettre au lendemain de sa défaite et, alors qu’il est encore à la discrétion du vainqueur, contester sa victoire, lui adresser des défis insolents ou simplement narquois et lui susciter de nouveaux ennemis.

Le grand mérite de Dupleix fut de n’avoir jamais accordé aux arguments juridiques qu’une valeur d’archives ; il attendait tranquillement que les Anglais, pris en faute ou convaincus de complicité avec les Maures, lui offrissent une occasion de déchirer le traité de rançon et d’Espréménil avait pour mission de ne point la laisser passer. Après le léger incident des fusils, il fit plier Morse de déclarer, suivant l’article 5 du traité, tout ce qui appartenait à la Compagnie d’Angleterre ; puis son successeur Barthélemy lui fit des observations sur la quantité considérable d’Anglais et d’Indiens qui demandaient à quitter la