Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 2.djvu/435

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nait pas qu’il eut remis le commandement de la place à Paradis, sans avoir reçu l’agrément du Conseil supérieur.

« Vous me parlez, lui répondit Barthélemy, des difficultés que vous avez eues à faire cette nomination [celle de Paradis], dans la crainte de me faire de la peine et que vous n’avez jamais cherché à chagriner personne. Je l’avoue et l’ai toujours avoué depuis dix-huit ans que j’ai l’honneur de vous fréquenter et d’être sous vos ordres : livré à vous-même vous êtes le plus excellent caractère d’homme que j’ai connu en ma vie. Quelles occasions n’avez-vous pas eues et n’aurez-vous pas par la suite de vous venger des personnes qui vous avaient offensé grièvement ! Non, Monsieur ; vous êtes incapable non seulement d’en profiter, mais même de les mettre au jour ; au contraire votre bon cœur vous engagera toujours à recevoir favorablement ceux qui ne devaient s’attendre qu’à une juste indignation de votre part. Convenez donc avec moi que je suis bien malheureux de me trouver seul en butte au plus grand désagrément que jamais vous ayez donné à un honnête homme : car enfin, si votre intention était différente que celle que vous aviez marquée à d’Espréménil, ne pouvant ignorer que j’en avais eu communication, [en d’autres termes : si vous désiriez que je reste commandant à Madras], ne pouviez-vous pas par une seule ligne me rassurer là-dessus ? » (Mém., nos 124, 125, 126 et 127).

Il était difficile de faire entendre plus délicatement à Dupleix que Barthélémy n’était pas dupe de ses manœuvres ; mais qu’importait à Dupleix ? il avait atteint son but : Paradis commandait à Madras.

Une des lettres de Barthélémy nous dit qu’il n’avait pas demandé le moindre secours à Pondichéry contre les Maures. À quoi correspondait donc l’envoi de la petite troupe de Paradis, sinon à la nécessité d’avoir sous la main des hommes sûrs, le jour encore indéterminé mais prochain, où il faudrait prononcer l’annulation du traité de rançon ?