Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 2.djvu/441

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qui étaient venus au devant d’elle pour faire honneur au gouverneur anglais, mais en réalité pour rehausser le triomphe de Dupleix. Au grand village de Mouttalpet, dépendant de Pondichéry et à l’endroit dénommé l’Étoile, on vit arriver Dupleix lui-même, assisté de trois de ses conseillers et précédé de ses gardes à cheval en équipage neuf et du grand prévôt avec tous ses pions armés, et un grand renfort d’éléphants et de timbales. Il fit à Morse toutes les politesses possibles et tous deux firent leur entrée dans la ville par la porte de Madras, au milieu d’une affluence énorme de population ; à ce moment on tira 21 coups de canon. Un nombre égal fut encore tiré lorsqu’on arriva au gouvernement. Madame Dupleix, somptueusement habillée et entourée comme une reine de plusieurs dames d’honneur, y attendait Madame Morse. « Elle n’avait point oublié, nous dit Villebague dans une longue lettre à son frère (Mém., n° 230), d’ajouter à ses ornements naturels, tous les diamants et pierreries qu’elle crut nécessaires à relever l’éclat d’une réception aussi flatteuse pour elle, qu’elle était humiliante et triste pour l’étrangère, qui soutint en cœur de reine tout ce cérémonial et qui eut assez de force d’esprit pour ne montrer aucun chagrin, quoique son cœur en fut pénétré. »

Une réception aussi solennelle était-elle nécessaire ? Peut-être, si Dupleix voulait impressionner la population indienne par une manifestation sensible de sa victoire et de sa puissance ; non, si l’on se place uniquement au point de vue de la déférence respectueuse et attristée que l’on doit au malheur, et telle est l’opinion d’Ananda dans ses mémoires. Il nous dit que quand tous les yeux étaient tournés sur Morse on peut imaginer quels étaient ses sentiments.

« Peindre la douleur qu’il dut alors éprouver et la mesurer