Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 2.djvu/442

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n’est pas en mon pouvoir. La joie et le chagrin sont des êtres jumeaux dans ce monde. Un revers de fortune n’est pas une disgrâce aux yeux du sage. La chute du Fort St-Georges et les souffrances infligées à ses défenseurs ne sont que des épreuves impénétrables de la Providence. Mais le malheur ne devrait jamais tomber même sur nos ennemis ». (Ananda, t. III, p. 131-132).

Laissons pour un instant Morse et les Anglais à Pondichéry, où ils furent d’ailleurs traités avec toute sorte d’égards et revenons à Madras, dont nous désirons esquisser plutôt que raconter l’histoire sous la domination française.

Le départ de Morse n’avait pas rendu l’administration de Paradis beaucoup plus facile[1]. La situation commerciale de la ville était des plus mauvaises. Dupleix n’avait désiré conserver Madras que pour l’empêcher de renaître, et c’était une opération qu’il pensait pouvoir effectuer en attirant à Pondichéry les marchands indiens et arméniens qui y étaient établis : plus de commerce, plus de rivalité et Pondichéry devenait la métropole incontestée de la côte Coromandel. Mais il se trouva que les difficultés furent plus grandes qu’il ne l’avait prévu. Les marchands indiens, qui avaient fui à notre approche, sentaient instinctivement qu’on ne déplace pas ou qu’on ne crée pas à son gré un mouvement commercial et ils n’avaient qu’une médiocre confiance dans les affaires de Pondichéry, qui avaient toujours manqué d’envergure ; par crainte précisément d’être obligés de déplacer leur commerce, ils ne tenaient nullement à revenir à Madras. Paradis pensa les amadouer

  1. Pendant les huit jours qu’avaient duré les arrêts de Bruyère, il avait dirigé les affaires avec Friell, seul conseiller restant, et son neveu de Brain, préposé aux affaires de la marine, en remplacement de Desjardins. Le 15 novembre Dupleix lui envoya un renfort composé de Cotterel, la Touche, Lhostis et Herygoyen.