Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 2.djvu/483

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n’aurait pas été renforcée, il y avait peu de chances qu’elle osât attaquer Madras ou Pondichéry ; elle était trop faible pour entreprendre une telle opération. Le pis qui put arriver était que, solidement ancrée à la côte Coromandel, elle y demeurât ou qu’étant sans cesse en croisières depuis Karikal jusqu’à Paliacate elle ne bloquât nos ports, n’arrêtât complètement notre commerce et n’empêchât tous nos approvisionnements par mer. Elle pouvait ainsi nous réduire, sinon à la famine, du moins à la gène la plus étroite, prélude assez fréquent des découragements et des troubles. Il fallait d’autre part compter avec le nabab d’Arcate qui, en dépit de la paix récemment conclue, pouvait du jour au lendemain modifier son attitude et se déclarer à nouveau notre ennemi, s’il devait y trouver son compte.

La vigilance et une diplomatie très serrée pouvaient seules assurer l’existence et la conservation de nos établissements. Dupleix qui connaissait à merveille l’âme indienne, manœuvra avec une grande habileté. Ananda, chargé d’une sorte de service de renseignements, le tenait presque tous les jours au courant de tout ce qui se passait dans les cours du voisinage et jusque chez les petits paliagars. Dupleix avait une confiance absolue en ses avis ou ses conseils et il était rare qu’il n’y conformât pas sa conduite. Le plus souvent c’était Ananda lui-même qui rédigeait ses lettres et elles étaient nombreuses. Convaincu que nul autre moyen n’était plus propre à entretenir l’amitié ou à retenir les défections, Dupleix s’était fait une sorte d’obligation d’écrire tous les mois au nabab, même quand il n’avait rien d’essentiel à lui communiquer.

Les Anglais jouaient d’ailleurs le même jeu ou un jeu analogue et le nabab se trouvait ainsi sollicité entre les